Odette, son mari et ses enfants

Née en décembre 1980, originaire de Tana, Odette a très vite connu des difficultés. Vendant des cartes et de la vanille dans le centre ville vers la poste, on apprécie son sérieux et sa bonne volonté. Dans les premières à être parrainées, nous lui avons apporté un soutien dans sa mission de chef de famille qu’elle assure alors que son mari est régulièrement hospitalisé pour maladie mentale. D’une grande honnêteté, elle veut donner à ses enfants une bonne éducation, elle choisit de les inscrire à l’école publique moins onéreuse pour pouvoir assumer tous les frais. Discrète, elle garde toujours le sourire.

Elle a deux garçons (nés en 2000/2001) qui vont à l’école et deux filles qui restent encore avec elle (2005/2007).

A mon arrivée en mars 2012, elle me fait part de ses difficultés et comme aux autres, nous allouons un budget supplémentaire pour grossir son achalandage, elle a choisi le matériel de radio, et petite électricité. Elle suit les cours d'alphabétisation et s'applique beaucoup mais a quand même des difficultés, ne sachant ni lire, ni écrire. Elle est heureuse de participer à la journée récréative organisée à l'aéroport et à Croc Farm. Journée pique nique exceptionnelle où elles ont pu sortir des murs de la capitale pour la 1ère fois, découvrir la saveur d'un café pris à la terrasse d'un restaurant.

Août 2012. Les enfants que nous avons inscrits à L'alliance française, ont suivi les cours de rattrapage cet été.

La vie suit son cours pour elle et ses enfants. En raison de son culte, elle ne peut assister ni à l’enregistrement radio ni au bilan de santé malgré tous les arguments que nous avons avancés pour lui montrer à quel point une couverture santé gratuite est importante. En accord avec le dispensaire, Eugénie lui proposera un autre rendez-vous.

 

Avril 2013. Lors de notre rencontre, après avoir replacé des bases de confiance nécessaires pour continuer à avancer ensemble, nous lui proposons de lui ouvrir un livret d'épargne à la poste à l'exemple de Lucienne, et ceci afin de l'encourager à gérer l'argent dont elle peut disposer. Nous démarrerons le livret avec une somme symbolique pour initier ses prochains dépôts. Elle nous parle également du souci qu'elle a pour son fils ainé actuellement en 6° et qui a du mal à suivre. Nous envisageons de le faire bénéficier de cours de rattrapage.
Enfin décidée à aller au dispensaire, nous l'accompagnons avec sa fille cadette, pour un bilan de santé. Au retour, elle est heureuse de nous montrer qu'elle a eu quelques médicaments pour soigner sa peau.
 
Août 2013. Solo passe en classe supérieure il a réussi son examen, Mais Odette est inquiète, elle devra payer plus pour les frais  de scolarité de ses enfants.

Fin novembre 2013. Pour elle comme pour toutes les vendeuses du quartier d'Antanarenina, les ventes diminuent, il n’y a pas beaucoup de touristes. C'est difficile.

 

Mai 2014. A mon arrivée, nous rencontrons Odette pour passer un moment ensemble. L'adhésion à l'association n'a pas tellement changé sa vie sauf qu'elle peut se permettre de payer l'écolage sans trop de problèmes. Elle et ses enfants sont en bonne santé mais le mari a toujours des crises incontrôlables depuis 8 ans. Il refuse tout médicament pensant qu'on veut l'empoisonner. Les jours de crise, la famille ne peut pas dormir mais il ne casse plus comme avant et frappe moins souvent. Les enfants poursuivent leur scolarité. Elle continue à avoir un revenu d'un commerce de petits outillages électriques qu'elle partage avec sa mère et de sa vente de cartes, vanille, cannelle. La plupart du temps, elle a assez pour nourrir tout le monde. Les enfants participent en allant chercher l'eau, en faisant la vaisselle. Elle n'a pas réussi à faire une épargne depuis l'ouverture de son livret, elle a même dû retirer un peu d'argent pour passer une mauvaise période. En ce qui concerne le terrain, c'est le même que Marie 20/30 m2 à 8 millions d'ariary. Nous rappelons les conséquences d'un micro crédit fait par l'association ; la subvention servirait au remboursement de la somme avancée. Il leur appartient d'avoir l'argent pour la construction, au mieux 1 500 000 Ar (500 euros), le fait qu'ils n'auraient plus de paiement de loyer à faire compenserait la subvention qu'ils n'auraient plus. Odette est d'accord avec ces conditions et veut bien faire le nécessaire pour cela.

Questionnée sur son enfance, elle nous raconte qu'elle est née en campagne sur la route de Morondava dans une famille mono parentale de 7 enfants. La vie était si dure qu'à 8 ans, elle a pris un petit frère sur son dos pour venir mendier à Tana au quartier d'Antanarenina. C'est là où elle a connu Marie et Lucienne. Au début, elle a souvent subi de mauvais traitements, mendiant sur un lieu occupé par des plus anciens: des coups au visage, etc... mais elle a toujours affronté rentrant le soir à Anosy pour dormir. A une certaine période, elle a pu bénéficier d'un programme d'une ONG AIM qui proposait une formation couture, broderie et une alphabétisation, patronnée par les scouts catholiques . Mais cela a duré seulement trois années et depuis elle a tout oublié. Elle a connu celui qui est devenu son mari, depuis elle est toujours dans le même quartier pour gagner sa vie.

Nous la retrouvons avant mon départ pour quelques achats dans son commerce et boire le verre de l'amitié ensemble.

Mars 2015

Le quartier où habite Odette est aussi inondé.L'eau est à plus de 4O cm dans la maison mais elle ne veut pas la quitter.

Octobre 2015

Les deux garçons se font tirer l'oreille pour aller à l'école. Eugénie veille.

Février 2016

Nous rencontrons Odette qui nous dit avoir des difficultés à payer son loyer de janvier compte tenu du manque de touristes et d’ »internet »(!!! elle-aussi). Je lui achète également 3 paquets de cartes en papier antaimora pour lui faire un apport de 30000 A, largement payées.

Nous convenons d’un rendez-vous le lendemain avec ses deux fils qui ne trouvent plus nécessaire d’aller à l’école.

Le lendemain donc, nous rencontrons Bernard qui est venu seul au rendez-vous, son frère ayant, parait-il, du travail. Il semble ou ne pas comprendre ou vivre dans une illusion de travail facile à trouver. Il dit ne plus jamais vouloir aller à l’école, nous parlons de mécanique auto, de formation, il semble que là, on lui mette le doute. Il consent à réfléchir et nous dira la semaine suivante sa décision.

Plus tard, nous retrouvons Odette qui nous dit que la discussion a créé des problèmes à la maison avec le père. Le fils ne change pas d’avis. Avec son frère, ils font désormais des petits boulots qui leur permettent de contribuer aux dépenses. Odette me dit qu’ils sont libres, eux, et veulent le rester!

Pour marquer le respect de notre accord, nous continuerons donc à donner la subvention à Odette, toutefois légèrement amputée d’une somme symbolique, compte tenu des deux garçons qui travaillent (?).

 

Septembre 2016

La scolarité des filles se poursuit quant aux deux garçons, ils n’ont pas changé d’avis et travaillent désormais.

 

Octobre 2017

Pas de problème pour Odette, heureuse de récupérer des vêtements à mon arrivée. Les garçons travaillent, contribuent à la nourriture en apportant du riz. Les filles sont scolarisées. Elle parait heureuse.